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Lescar - Orgue Wenner (1869) de la Cathédrale de Lescar

Maître d'ouvrage : DRAC Aquitaine.

Maître d'œuvre : Monsieur Jean-Pierre Decavèle.

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Console depuis le fond
du Positif
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Console depuis le Positif
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La mécanique et le trémolo du Récit
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La tuyauterie du Grand-Orgue depuis
le plancher du Récit
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Les soupapes du Récit
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Tuyauterie du Grand-Orgue C
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Tuyauterie du Positif
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Profil

Table des matières :

Composition

Grand-Orgue :

Bombarde 16 Montre 16 Principal 8
Doublette 2 Bourdon 8 Quintaton 16
Plein-Jeu IV rgs Trompette 8 Keraulophone 8
Prestant 4 Cornet V rgs Clairon 4

Positif :

Montre 8 Salicional 8 Violoncelle 8
Prestant 4 Euphone 8 Trompette 8
Clairon 4 Bourdon 8  

Récit Expressif :

Flûte Harmonique 8 Viole de Gambe 8 Voix Angélique 8
Flûte Octaviante 4 Voix Humaine 8 Basson-Hautbois 8
Trompette 8 Clairon 4

Pédale :

Bourdon 16 Flûte 8 Bombarde 16
Trompette 8  

Tirasse GO, copula PO/GO, Récit 8/GO, Récit 16/GO, Appel anches Pédale, Anches GO, Anches Récit, Trémolo, expression à cuiller.

Rapport de travaux

L'orgue a été démonté durant la semaine du 30 juillet au 04 août 1995, pour le protéger durant les travaux de restauration des voûtes. La tuyauterie des claviers de Grand-Orgue et de Positif a été rapportée en atelier, celle du clavier de Récit est restée en place. Tous les mécanismes de tirage des notes et des jeux ont été démontés. Le bloc console et Barker est revenu en atelier.

Le démontage a permis d'effectuer le relevé du plan de l'orgue et de contrôler les points déficients de l'instrument. À partir de cette étude nous avons fait un certain nombre de constatations qui nous ont permis de suivre un plan de restauration cohérent tout en essayant d'améliorer les défauts inhérents à l'édification de l'orgue.

Sommiers :

Les tests réalisés sur les sommiers avec la tuyauterie en place, ont permis de constater leur parfait état (pas d'emprunts). Par conséquent, le réencollage n'étant pas à réaliser, les sommiers sont restés sur place pendant toute la période du chantier. Ce choix a été très opportun, compte-tenu de la durée du chantier, les sommiers auraient beaucoup souffert d'un transfert et d'un stockage dans un lieu d'hygrométrie différent de leur situation d'origine.

Toute la restauration à été réalisée sur place durant la période de travaux entre 1998 et 1999. Les sommiers ont été retournés après mise à nu des chapes. Les fonds ont été déposés et les soupapes ont pu être entièrement remises en peau. Ces soupapes sont collées à la colle chaude en queue et sont assujetties par un tasseau de pin. Le fond de grille a été soigneusement dressé et recouvert d'un papier bristol sur toute sa surface. Les soupapes ont, ensuite, été recollées; les pointes guides, remises en place et les layes furent remontées au fur et à mesure de leur achèvement. Un point assez délicat a consisté à remettre en place les ressorts. Ils sont en laiton d'origine et étaient assez mal adaptés à un toucher précis. Nous avons choisis de les conserver en les retravaillant, tout du moins pour les claviers de Positif et de Récit qui agissent en direct sur les soupapes. Il a fallu reboucher les supports trop accentués, règler les pointes et modifier les profils afin qu'ils ne talonnent pas sur les barres de repos. Le clavier de Grand-Orgue étant actionné par une machine Barker, il n'était pas nécessaire d'opérer de telles modifications, néanmoins, nous avons veillé aux profils pour éviter les déchaussements.

Les grilles de fond ont été recouvertes de peau, après nettoyage, car les fonds anciens étaient fendillés et présentaient des risques de rupture qui auraient entraîné des cornements irréductibles.

Remis dans leur position originale, les sommiers furent munis de leurs registres et chapes. Ils n'ont subi aucune modification, hormis celles concernant les moteurs de façade, pour les sommiers de Grand-Orgue.

Lors de l'étude préalable, les calculs de capacité ont mis en évidence le déficit en vent des gravures des sommiers. Le seul moyen de résoudre ces problèmes consistait à agir à l'arrivée du vent, donc sur les tuyaux. Les plus importants consommateurs sont les tuyaux de façade, éloignés du sommier et utilisant de gros diamètre de postages ainsi que les basses en bois de la Montre 16. La mise en place de moteurs pneumatiques a permis de réduire la consommation de moitié et les problèmes ont donc disparu. Ainsi sur le 1C, la capacité des perces a été réduite de 1000mm2. Il était impossible d'agir autrement car les déficiences provenaient uniquement d'un mauvais calcul des capacités des soupapes.

Les sommiers de Grand-Orgue ont été modifiés sur place. Le seul changement consiste en une diminution des perces des gravures des basses pour les registres de Montre 16 et 8. Les postages sont remplacés par des tubulures de diamètre 10mm.

36 moteurs de notes pneumatiques de type Cavaillé avec système de décharge ont été fabriqués. Fabrication suivant le principe du sommier : tables, ceintures et laye en chêne, barrages en sapin, soupapes en chêne garnies d'une peau mégis double épaisseur, pointes guides, ressorts et esses en maillechort, boursettes en peau d'agneau. Sous le moteur, un petit soufflet en peau fine tracte la soupape. Ce moteur est commandé directement par le postage. La tension du ressort et la vis de réglage de l' échapement permettent de règler précisement la répétition du soufflet.

Ces moteurs seront placés par groupe sous chaque partie de façade. Les postages sont replacés à partir de ces moteurs.

Mécanismes :

La partie mécanique présentait un certain nombre de défauts :

  • Les armements inversés;
  • Les filetages en bout de course;
  • L'accouplement Récit 16 ne tirait pas complètement.

Ce dernier point était la conséquence d'une machine Barker mal réglée : la course des soufflets était réduite : 16mm au départ de la Barker, c'est un peu faible par rapport au nombre des soupapes à tirer (7 par note lorsque tous les accouplements sont appelés, dont 2 à 180 de pression). Il etait indispensable d'augmenter cette course pour pouvoir régler les différents tirages en cascade. Le démontage des soufflets nous a permis de mettre en évidence le chevauchement des éclisses qui implique une grande raideur. Le montage des tables de soufflet sans charnière et la présence d'un tasseau sur le talon augmentaient cette raideur, le soufflet étant «pincé» sur l'arrière. Le montage a été totalement corrigé pour obtenir une course plus importante, la course des soufflets est maintenant de 20mm. Le système de la Barker reste rudimentaire car c'est un type à cônes avec des possibilités de réglages très réduites. Il faut absolument une excellente répartition des attaques suivant les différents appels pour obtenir une bonne répétition.

Tous les éléments mécaniques ont été revus :

  • Restauration des l'abrégés métalliques. Nettoyage et peinture des rouleaux, vérification des garnitures des bras, vérification et correction du jeu des axes dans les crapaudines;
  • Les équerres sont en barres communes, sur des parts-closes en chêne. Nettoyage et remplacement des garnitures, remplacement des axes;
  • Toutes les parties métalliques ont été brossées et recouvertes d'un vernis noir contre la rouille. Les axes ont systématiquements été réajustés, les goupilles changées...
  • Les vergettes ont été nettoyées, les fils et éléments cassés ont été changés. Dans l'ensemble, l'état était soigné et il n'y pas eu trop de lésions à corriger.

Il avait été souhaité l'extension de l'ensemble de la pédale à 30 notes. Cette extension se justifie pour permettre l'interprétation musicale des plus grandes œuvres du répertoire. Mais, cette extension ne pouvait être réalisée que dans le plus grand respect du matériel existant.

Nous avons donc mené une étude de faisabilité pour définir les possibilités. Nous avons trouvé un compromis, reprenant la plupart des éléments anciens et restituant, en copie, les nouvelles parties mécaniques. L'abrégé de départ a été complété par ajout de cinq rouleaux supplémentaires sur une nouvelle table en chêne plein. La table a été élargie de 22mm pour laisser la place aux deux rouleaux du côté C, les trois rouleaux du côté # suivent la progression initiale. Les nouvelles équerres sont superposées au dessus des renvois d'équerres horizontaux. Deux et trois rouleaux sont intercalés aux abrégés sous sommiers du côté C et du côté #. Les sommiers de pédale sont modifier pour permettre la mise en place des nouvelles notes dans la basse, sur les gravures libres. Les sommiers ont été ramenés en atelier, remaniés et réencollés. Certains barrages ont été rechargés pour réduire les dimensions de gravures. Les vingt tuyaux correspondant aux jeux à compléter sont fabriqués en copie. Le pédalier de 30 notes est copié dans le style XIXe siècle, plat en chêne noirci, longueur des marches de 70cm, feintes légèrement incurvées. Les caractéristiques d'accroche et de finition sont identiques sur le pédalier d'origine, conservé à coté de l'orgue. Enfin la tirasse est complétée sur sa barre mobile d'appel.

Alimentation :

L'alimentation de l'orgue était totalement déficiente, avec des houppements importants, à tous les claviers. Le Clavier de Grand-Orgue ne pouvait pas être joué en Tutti sans une importante chute de l'accord.

Les conclusions de l'étude furent les suivantes :

  • Les réservoirs primaires sont dépendants. Celui du côté C était plus chargé que celui du côté #, si bien qu'il se produisait un déséquilibre des tables. Les réservoirs internes de forte pression étaient responsables de ce déséquilibre.
  • Comme nous l'avons décrit au chapitre des sommiers, les capacités du clavier de Grand-Orgue étaient mal calculées. Chaque sommier était alimenté par un portevent de section interne 80x220mm soit 17600mm2. La capacité des soupapes pour un accord de 8 notes plus une en tirasse était de 37890mm2. Nous avions donc un déficit de 2690mm2 alors que la capacité des portevent doit supérieure à celle des soupapes. Dans de telles conditions, il était impossible d'obtenir une quelconque stabilité.
  • Les claviers de Récit et de Positif étaient aussi soumis à des houppements mais dû à un trop grand éloignement des plans sonores par rapport aux réservoirs.

Pour résoudre ces problèmes, nous avons adopté un nouveau shéma d'alimentation en divisant l'alimentation primaire en deux groupes distincts, avec deux ventilateurs. Premier groupe à basse pression (105mm) constitué des deux grands réservoirs . Deuxième groupe à forte pression (160mm) avec un seul réservoir en fonction dans le réservoir C. La forte pression alimente la Barker et les anches du Récit (Trompette, Clairon, Voix humaine). Le deuxième réservoir à forte pression du coté # est condamné. Par contre, les deux grands réservoirs sont toujours couplés bien que nous ayons souhaité les séparer. Cette dernière phase devait faire l'objet de travaux complémentaires mais il a été estimé que le résultat obtenu était déjà largement satisfaisant.

Pour le Récit et le Positif, nous avons fabriqué des petits soufflets cunéiformes destinés à compenser les variations de pression due à l'inertie des réservoirs principaux trop éloignés. Soufflets d'une largeur correspondant à la largeur du portevent et d'une longueur d'un rapport de 3/2, éclisses et tables en sapin, peau de mouton de première qualité. Ils sont maintenus en équilibre par des ressorts à pinces. Les soufflets du Positif sont placés sous le plancher de la console, sur le fond de laye. Le soufflet de récit est sur le parcours du portevent assez bas pour ne pas contrarier le Trémolo tout en restant efficace.

Les grands réservoirs a quatre plis ont été restaurés sur place car il n'y avait aucun moyen de les déplacer. Ils ont été dépecés, nettoyés à la vapeur et remis en peau, double épaisseur aux aines. Un papier faux-bois fabriqué par nos soins habille l'ensemble avec un très bel effet.

Tuyauterie :

Comme nous l'avions relevé lors de notre première visite, le diapason est un peu haut. Lors du démontage, à une température de 25°, la moyenne des A était de 447,6Hz.

Nous obtenons finalement un A 440Hz à une température d'environ 18°.

La tuyauterie est magnifique et nous avons peu de difficultés lors de sa restauration. Elle avait fait l'objet de soins attentifs lors des travaux de 1974 et nous avons pu les compléter sur quelques postes de détails comme le remplacement des oreilles ou la soudure de déchirures.

Il y a quelques points un peu étonnants comme l'accord des tuyaux de bois qui sont parfois trop longs (au Positif). Mais il ne faut pas oublier que l'harmonisation a été mainte fois remaniée pour essayer de gommer les défauts d'alimentation. Ces derniers étant pratiquement absorbés, la sonorité paraît beaucoup plus ferme et précise qu'elle n'a jamais pu l'être auparavant.

On regrettera peut-être de ne pas être revenu à la compostion d'origine avec le Quintaton de 16 au clavier de Grand-Orgue.

Le Plein-Jeu avait à l'origine quatre rangs, il a été transformé en progression harmonique de I à IV rangs. On comprend aisément pourquoi : il était systématiquement faux dans les Tutti. Maintenant remis en place, c'est un Plein-Jeu à reprise d'octave sur les C, composition assez étrange en l'absence de Cymbale puisque déséquilibrée avec des reprises abruptes et alourdissant considérablement les dessus avec une résultante de 32 pieds au 4C. C'était un schéma parfois adopté par les facteurs post-classiques et qui perdure ici.

Il n'y a pas eu d'harmonisation de l'instrument puique le propre des travaux historiques est de conserver l'aspect sonore de l'orgue dans son état d'origine. Notre travail a donc été effectué dans le plus grand respect des embouchages, des dentitions, des flux. Les modifications apportées se limitant au positionnement des biseaux, à l'alignement des lèvres et à une simple égalisation en timbre et en force.

Conclusions :

Nous avons essayé d'œuvrer dans le sens d'une restauration pure de l'instrument dans son état historique, en remédiant aux défauts que nous avons pu constater dans la structure technique de l'instrument. Nous voulions que cette restauration, d'un orgue qui, sur le plan régional, est un instrument d'exception, aboutisse à des travaux qui recoivent l'assentiment, sinon de tous (il ne faut pas rêver), mais du moins du plus grand nombre, avec le plus grand respect du matériel existant.

Nous pensons y avoir réussi mais notre attention doit demeurer vigilante sur une machine qui reste fragile dans un environnement souvent hostile.

© Manufacture Bretonne d’Orgues. Tous droits réservés.