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Wisches - Orgue Stiehr-Jaquot (1859) de l'église St Michel

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Sommier de Pédale
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Vue du Grand-Orgue
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Vue du Récit
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Flûte traversière du Positif

Composition

Positif de dos, 54 notes :

Montre 8 Flûte 8 Bourdon 8
Salicional 8 Flûte 4 Dulciane 4
Flageolet 2 Cromorne 8 Hautbois 8

Grand-Orgue, 54 notes :

Bourdon 16 Montre 8 Bourdon
Flûte 8 Salicional 8 Gambe 8
Prestant 4 Flûte 4 Fugara 4
Doublette 2 Cornet IV rgs Fourniture III rgs
Trompette 8 Clairon 4

Récit expressif, 54 notes :

Flûte harmonique 8 Gambe 8 Voix céleste 8
Flûte octaviante 4 Basson 8 Hautbois 8
Clarinette 8 Voix humaine 8

Pédale, 30 notes :

Fugara 16 Bourdon 16 Flûte 8
Gambe 8 Basson 16 Trompette 8
Clairon 4  

Accouplement III/II - Accouplement I/II - Appel anches pédale - Appel anches II - I en 16

Présentation des travaux

Fruit de la synthèse du travail de deux facteurs : Stiehr en 1852 et Jaquot en 1872; l'orgue de Wisches est resté muet pendant trente cinq ans avant de renaître. Dans les années 1960, le ventilateur avait rendu l'âme et le clergé de l'époque avait jugé bon de ne pas le remplacer. Les raisons de ce choix paraissent encore obscures. L'instrument fut donc classé au regard de son histoire, les considérations musicales étant totalement impossibles. Ces longues années hors service ne permettaient pas de faire un bilan exhaustif du fonctionnement et des problèmes d'utilisation. Néanmoins, la renommée des deux facteurs créateurs était suffisante pour estimer le travail bien fait et envisager la restauration avec sérénité.

Lors du démontage l'orgue fut remis en marche. Le ventilateur neuf ayant été apporté et mis en place, on a donc pu entendre à nouveau l'orgue et avoir une petite idée de ses sonorités. Ces essais restèrent malgré tout très limités car l'état global de la tuyauterie et de la mécanique était très médiocre voire catastrophique pour certains jeux. Si les fonds présentaient encore une belle unité, les anches étaient quasi inaudibles, plus de la moitié ne fonctionnant plus.

Les travaux exécutés suivent parfaitement le cahier des charges, appliqué suivant les critères de restauration des orgues historiques. Les éléments sont restaurés «en l'état» aucune modification n'étant permise. Seule l'extension du pédalier à 30 notes fut adoptée dans le but d'ouvrir le répertoire sur l'écriture musicale du XIXe siècle. Le pédalier était auparavant restreint à 18 notes.

Restauration de l'orgue

Inventaire, études, démontage et transport :

Nous avons apporté un ventilateur pour tester le parcours du vent. Les essais de remise en vent ont permis de définir l'état exact des réservoirs et de faire le relevé de pression. Les réservoirs se trouvaient en excellent état, les peaux étaient restées sans déchirures ni point de fuites. Par contre des fuites se produisaient aux joints des plateaux sur les réservoirs de Stiehr.

Le parcours du vent suit un cheminement inhabituel. L'introduction depuis le ventilateur se fait par l'intermédiaire d'une boîte à rideau qui est reliée au réservoir secondaire. L'introduction en vent est dans les réservoirs primaires. Le réservoir secondaire alimente tout l'instrument tandis que les primaires n'alimentent que la Barker.

Le passage des réservoirs inférieurs au supérieur se fait par l'intermédiaire de très grands gosiers à 10 plis, munis de soupapes de retenue qui fonctionnent à l'envers du schéma habituel. Lorsque le réservoir supérieur est en vent les deux primaires retombent car la boîte à rideau est alors fermée. Il faudrait donc qu'il y ait toujours une petite consommation en vent pour que le primaire reste en position élevé. Sur les deux primaires, seul le moins chargé reste en fonction tandis que le second ne se remplira qu'en cas de consommation importante.

Malgré cette disposition étrange, le vent est plutôt stable sur le secondaire, les houppements que l'on peut ressentir provenant surtout de l'éloignement des plans sonores et de l'inertie des portevent. Cette inertie avait été corrigée par la mise en place de deux anti-secousses cunéiformes au départ du trajet vers les sommiers.

Les pressions relevées au démontage étaient de 80mm de colonne d'eau pour les primaires (pression relevée à la Barker) et de 72mm aux claviers manuels (pression relevée sur le 4c du grand-orgue et du positif).

Ces pressions se sont revélées légèrement plus importantes au remontage puisque nous avons retrouvé respectivement 82mm et 75mm.

Après ces premières constatations, nous avons pu remettre l'orgue en état de fonctionnement. Quelques cornements ont du être circonvenus notamment sur le clavier de Récit. Le toucher de ce clavier était très dur et les soupapes étaient toutes assorties de double voire triple ressorts. Malgré nos efforts, certaines touches sont demeurées réticentes à un fonctionnement décent. Le clavier le plus léger et semblant offrir une bonne cohésion sonore était celui du Positif qui a pu nous donner une bonne idée de ce que nous pouvions attendre de la restauration. Le pédalier était injouable et le Grand-Orgue se trouvait dans un état moyen mais permettant d'en tirer quelques sonorités.

Ces opérations se sont réalisées en préliminaire du démontage au début du mois de novembre 2000.

À partir du mois d'avril 2001, l'inventaire de la tuyauterie a été réalisé au préalable du démontage. Il s'agissait de vérifier tous les jeux, et de les reconstituer à partir des tuyaux déposés dispersés dans le buffet. C'étaient surtout les jeux d'anches du Récit qui avait subi une dépose partielle suite à l'effondrement des basses du Basson 8. Quelques tuyaux de Pédale et de Grand-Orgue y étaient mélangés tandis que le Positif se présentait complet à part les deux extrêmes tuyaux du Cromorne.

Toute la tuyauterie a ensuite été déposée et rangée dans des caisses-tiroirs qui permettent un examen rapide et précis.

Le test des sommiers et les relevés sur DAT n'ont pas pu se faire compte-tenu du très mauvais état général. Il était évident que les lésions des sommiers exigeaient un démontage et une restauration en profondeur. Les sons étaient perturbés par des emprunts, des cornements, des notes muettes dont le résultat en enregistrement était purement inaudible.

Buffet, charpente et boîte expressive :

Les buffets en chêne sont protégés par un vernis bouche-pores brillant. La surface a été nettoyée à l'éponge humide puis le vernis fut ravivé par une couche de vernis alcool très dilué. Tous les trous de fils, de porte-manteaux ont été bouchonnés, le placage des tampons de laye a été remplacé par endroits. Ces bois neufs sont traités et mis en teinte pour se fondre avec les bois anciens. Dans le même temps, la tribune a été restaurée et traitée de façon identique.

Protection par aspersion d'un produit anti-xylophages de l'intérieur du buffet, de la charpente et de la boîte expressive. Cette opération a été renouvelée à deux mois d'intervalle. Certaines zones très piquées ont été imprégnées. La traverse centrale de soutien du sommier de Grand-Orgue C a été refaite en copie car elle tombait en poussière. Les portevent ont été étanchés au bouche-pores mais celui du Positif était trop altéré et a été remplacé. Les aubiers ont été tranchés et remplacés par du bois sain. Cette opération a été réalisée particulièrement sur les panneaux de boîte expressive et certains tuyaux de bois.

La charpente, les plafonds, planchers, échelles et palissade furent nettoyés, traités contre les vers, complétés et rétablis.

Lors du remontage, il s'est avéré que la palissade arrière surplombant la Pédale était atttaquée par les capricornes. Non seulement la résistance était considérablement amoindrie mais le risque de chute de poussière sur les sommiers de Pédale était constant. Nous avons décidé de la remplacer, en accord avec la mairie. Le bois a été fourni par une entreprise locale, nos heures n'ont pas été comptées.

Sommiers :

Les sommiers de Stiehr sont fabriqués suivant la technique des sommiers à flipots. Il n'y a pas de table pour operculer les gravures mais des flipots en chêne adaptés entre deux barrages. Cette technique présente l'avantage d'éviter tout emprunt par décollement ou fente de table. Néanmoins, les retraits sont plus importants et la planéité de l'ensemble est difficile à obtenir. Lorsque les flipots sont trop décollés ou en retrait, il faut les réajuster en rapportant un flipot en épaulement, à cheval sur le flipot et sur le barrage. De cette façon, on augmente la surface de collage et le flipot s'appuie sur le barrage, il ne peut plus glisser en cas de nouveau décollement. Bien entendu les collages sont à la colle animale.

La mise en place de joints en casimir n'a pas eu l'effet escompté pour pallier aux petites différences. Pour ce type de sommier, le casimir doit être proscrit au profit de feutres beaucoup plus souples de type liegeling.

La difficulté est accrue par le manque de raideur de ces sommiers. Dans le temps, ils se comportent comme un composite cintrable. Si bien qu'ils accusent tous une flêche centrale importante. Le glissement des registres , leur frottement avec les chapes, tout doit être surveillé, testé pour obtenir un équilibre parfois précaire.

Les soupapes sont collées en queue avec un retour en angle sur la traverse de fond de laye. Ce détail de collage est une erreur technique. Collée sur un bois qui travaille naturellement suivant l'hygrométrie, la peau subit des tensions qui contrarient la fermeture au niveau de la queue de soupape. Ce problème n'apparaît pas lorsque la peau est collée totalement à plat. L'influence du ventilateur qui déssèche en insufflant de l'air tiédi est probablement importante car j'ai constaté que l'effet empirait lors des périodes d'harmonie intense.

Les fermetures des layes ont été refaites, en poirier, pour celles qui étaient trop piquées.

Le sommier de complément de Pédale a été construit suivant le principe Stiehr.

Le sommier classique, avec table, de Jaquot, n'a posé aucun problème de restauration. Aucun des défauts décrits ci-dessus n'est techniquement possible.

Il a été nécessaire de remplacer les ressorts de soupapes du Récit et du Grand-Orgue. Nous avions constaté, au démontage, que les soupapes du Récit supportaient deux ou trois ressorts suivants les cas. Au remontage, il s'est avéré qu'un ressort unique était beaucoup trop faible pour remonter correctement la mécanique. Les ressorts anciens étaient de deux types l'un, probablement de Jaquot, en laiton de diamètre 16mm. Le laiton était assez mou, un simple travail en pince lui faisait perdre un tiers de sa course. Les seconds, plus petits avec des pointes très effilées avaient probablement été rajoutés lors d'entretiens. Après plusieurs tentatives nous les avons remplacés par des ressorts de diamètre 18mm. Pour le Grand-Orgue, le problème était assez semblable. Les soufflets Barker étant disposés verticalement, ce n'est pas leur propre poids qui les fait retomber mais la traction des ressorts de soupapes. Après restauration, la souplesse de ces soufflets étaient moindre et nous avions des difficultés pour obtenir une course suffisante. Nous avons donc remplacé les ressorts anciens, sauf pour les double soupapes, ils ont été conservés sur la deuxième soupape. Les autres sont rangés dans l'orgue car il n'est pas impossible qu'une fois les soufflets usés, on puisse les remettre en place.

Console :

Le placage d'os des claviers est entièrement neuf, le placage ancien était en galalithe, probablement de 1926.

Le clavier de récit, fourni par Jaquot au modèle de ceux de Stiehr est une curieuse récupération. Il semble bien que se soit, à l'origine, un clavier à balancier qui a été recoupé au niveau de l'axe. La mortaise arrière était totalement ouverte. Il était impossible qu'une pointe puisse le tenir correctement en place, si bien qu'une rondelle avait été collée en dessus et en dessous des touches pour les assujetir. Nous avons totalement rebouché les mortaise pour placer une pointe de queue.

On retrouve sur les châssis de Stiehr les découpes de l'accouplement à masselottes mobiles dont la commande devait se trouver à la place de l'actuel Trémolo.

Tous les claviers présentent de sérieuses inégalités. Les marches étaient voilées dans le sens longitudinal et vrillées. Pour préserver le maximum du matériel, il a fallu faire le choix d'éliminer les marches incompatibles avec un fonctionnement correct et de conserver celles plus légèrement altérées. Tout a été conservé au Récit, 7 marches ont été changées au Grand-Orgue et 5 au Positif.

Les oeillets d'accroche en gros cuir des claviers de Grand-Orgue et de Récit ont été intégralement changés.

Un nouveau système de fermeture a été intallé en fronton. En effet, une petite barre de butée en chêne renforcée par un fer a été placée de façon à recevoir le panneau concave de fermeture. Tout le panneau inférieur a été refait à neuf, en chêne, pour remplacer un panneau de récupération en sapin.

Les cuillers ont été replacées sur une traverse neuve et alignées de façon rationnelle. La cuiller de la tirasse a été ajoutée sur la gauche en complétant le support des axes. Les effets de dureté sont assez divers car plusieurs systèmes cohabitent suivant les accouplements et les appels. Les appels sont malheureusement d'une dureté épouvantable car à la traction, il faut à la fois tirer les trois registres simultanément mais aussi les ressorts de rappel.

Le pédalier a été mis en place sous la traverse. Il n'a pratiquement pas de barre de repos car sa position est très en arrière et l'accompagnement du Récit à la Pédale s'avère encore bien délicat. Il est copié dans l'esprit de celui de Saint Gengoult à Toul avec quelques modification notamment pour la barre de repos et la profondeur des marches.

La partie interne de la console est constituée d'un châssis plein en chêne sur lequel sont fixés les éléments mécaniques. Ce châssis à la forme d'un H, les claviers reposent sur la traverse, l'abrégé de ravalement du positif est placé en dessous fixé à chant sur l'avant. L'accouplement du positif a son rouleau pris dans le châssis par derrière l'abrégé de Positif. Légèrement au-dessus du pédalier, la traverse des axes de cuillers. Par dessus les claviers la barre d'équerres de commande du Grand-Orgue puis celle des équerres de renvoi. Toutes deux fixées sur l'avant du châssis. Fixées sur l'arrière : les deux barres de balanciers de démultiplication et d'accouplement du Récit, celle de l'accouplement est mobile suivant le même principe que l'accouplement du positif. Le châssis de machine Barker est maintenu par tenons et mortaises sur l'arrière du châssis de console et le tout est sommé des rouleaux de répartition des registres du récit. Cet ensemble est très compact et l'accès reste difficile.

Les tirages des registres ont été restaurés; les courses sont aléatoires d'origine, il n'y a pas de réglages possibles. Seules les porcelaines manquantes du Bourdon et de la Flûte ont été restituées en copie des anciennes. La plupart des porcelaines décollées se trouvaient sous le pédalier.

Il est très probable que l'ensemble console ait été fabriqué en atelier par Jaquot et puis transporté sur place intégralement monté.

Mécanismes :

Tous les mécanismes sont bien préservés. Il n'y avait pas de lésions particulières ni disparitions, ni remplacement inesthétiques. Tous les éléments ont très soigneusement été restaurés : remplacement des axes pour les abrégés en bois, remplacement des crochets pour les vergettes, remplacement des garnitures pour l'abrégé du Récit. Nous avons particulièrement veillé, lors du remontage, à bien donner un armement convenable aux équerres et aux bras; alors qu'au démontage beaucoup étaient contre-armés. Les crochets sont fréquemment directement repliés sur la vergette, sans espace libre.

Lors de la remise en fonctionnement de l'accouplement de récit, nous avons constaté une forte contrainte au passage des fils de commande. Les balanciers étaient simplement percés d'un trou de diamètre 4mm. Avec l'amplitude du mouvement de la barre d'appel, les fils se trouvaient pincés, entraînant de nombreux cornemenents. Nous avons rectifié les balanciers en les mortaisant sur une longueur d'environ 12mm. Le fonctionnement est ainsi totalement libre.

La mise en place de l'ajout et de la tirasse de Pédale nous a contraints à remplacer l'abrégé de Pédale d'origine ainsi que le départ vers les équerres de renvoi. Cet abrégé est fixé directement au revers du buffet derrière la console.

L'ancien abrégé a donc été déposé et ses rouleaux sont conservés dans l'orgue. Un abrégé neuf a été fabriqué, il occupe toute la longueur du soubassement car il a fallu répartir à la fois la tirasse vers les sommiers du Grand-Orgue en disposition diatonique et vers le sommier d'ajout placé en disposition chromatique sous le sommier # du Grand-Orgue.

Le mécanisme de la tirasse est un appel avec balancier placé à l'aplomb de l'abrégé de répartition du Grand-Orgue. Les balanciers sont à la division du sommier de Grand-Orgue et attrapent directement par des vergettes les bras de l'abrégé du Grand-Orgue. Ce système est totalement autonome et peut être déposé sans que subsiste aucune lésion irréversible.

Un soin particulier fut apporté à la machine Barker : les soufflets sont remis en peau, en prenant soin de bien conserver leur course d'origine et la souplesse des plis. Les butées sont remises en feutre, les layes entièrement refaites à neuf avec de nouvelles boursettes, les soupapes de commande et de décharge remises en peau, toute la quincaillerie nettoyée...

Les ressorts ont été remplacés, car comme pour les sommiers, ils avaient perdu en partie leur élasticité et le toucher n'était pas franc. Contrairement à ce que nous avions pensé lors de l'établissement du devis, il n'y a pas de ressorts de rappel pour la soupape de décharge. La soupape de décharge est un simple opercule octogonal occultant une perce de 25mm. Elle est directement reliée par une tige en laiton fixée en son centre au balancier de commande. Les écrous et contre-écrous définissent, en fonction du temps mort, les paramètres d'ouverture et de fermeture de la décharge. L'intérêt de ce système est l'absence totale de ressort de rappel qui implique souvent un toucher assez mou. Par contre, il n'est pas possible de règler la fermeture de l'opercule, tandis que l'on peut retarder son ouverture.

Le principal problème rencontré est la proximité des barres de butées avec les écrous du fil de commande de la soupape de charge. Certains écrous ont pu se coincer dans les barres.

Le deuxième point faible est l'accouplement d'octave grave. C'est un système de deux balanciers dont un en biais qui est placé en suspension sous la machine Barker. Le premier balancier a un point d'attache auquel arrivent les vergettes des soufflets et, quelques millimètres en dessous, une perce pour visser les vergettes qui partent vers les équerres de renvoi à la console. Mais comme la place manquait, ces balanciers sont placés entre le premier et le deuxième sommier de Barker, si bien que le premier sommier commande les balanciers en poussant par des pilotes. Cela correspond aux C et F#, notes les plus bruyantes au clavier. Les points d'accroche et de perce sont si proches que parfois les écrous se chevauchent avec les cornements que cela induit. Enfin, ces balanciers masquent totalement une partie de la mécanique et rendent particulièrement fastidieux les réglages. Le peu d'intérêt musical de cet accouplement, les défauts de tirage car les soufflets ont du mal à tracter la mécanique avec les double soupapes lorsque tous les accouplements sont appelés, font que son utilisation est peu courante.

Le toucher des trois claviers est singulièrement amélioré. Nous avons maintenant un instrument agréable à jouer dont la fiabilité est quasi totale mis à part les petits défauts de réglages qui s'estomperont avec les entretiens.

La mécanique de l'ajout de pédale est en extrêmité d'abrégé, des pilotes foulent une barre d'équerres en copie de celles de pédale, lesquelles renvoient le mouvement vers un abrégé couché à pattes de lapin qui actionne directement les soupapes.

Tous les éléments du tirage des registres ont été restaurés : rouleau des échelles de répartition, sabres, têtes des registres. Nous avons conservé toutes les goupilles de Stiehr sur les éléments qui en possédaient, Jaquot avait mis en guise de goupilles des vis à bois, nous les avons conservées.

L'ajout de Pédale est commandé à partir des rouleaux de tirage placés entre les deux sommiers de pédale. Un bras a été rajouté sur ces rouleaux d'où part une nouvelle commande renvoyée par une échelle de rouleaux dans le style Stiehr (rouleau en bois dans un cadre) vers un système de tirage par abrégé dans le style Jaquot (fer carrés et bras).

Tuyauterie :

Mis à part les tuyaux effondrés, perdus et les noyaux d'anches de Jaquot, la tuyauterie se trouvait dans un très bel état de conservation. Une fois les tuyaux nettoyés à l'eau claire et frottés au chiffon, ils ont retrouvés un bel état de brillance.

On se reportera aux relevés pour les mesures et commentaires jeu par jeu.

Les noyaux d'anches ont été intégralement remplacés pour les trois jeux de Jaquot, les pieds ont été refaits lorsqu'ils étaient boursouflés (pour le hautbois). Les pieds des noyaux carrés ont pu être conservés pour la plupart. Les noyaux Stiehr ont été brossés et vernis, les pieds ont été réajustés en les passant dans des tamis feutrés. Les pointes des corps ont été refaites partout où elles menaçaient de s'effondrer, les épaisseurs ont été renforcées pour éviter à nouveau le problème.

Les tuyaux de bois ont été entièrement révisés. Trois tuyaux en érable de la Flûte du Grand-Orgue ont du être refaits car ils étaient trop piqués, ainsi que deux fonds de tuyaux de la soubasse. Certaines parties en aubier ont été enlevées et remplacées au cas par cas, lorsqu'il était évident que l'étanchéité ne serait pas assurée.

Parmi les jeux de fonds, tous les tuyaux ont retrouvé leur état de 1872. Les déchirures et les décharges sur les pieds ont été ressoudées, les biseaux sont brossés, les calottes des Bourdons sont asujetties en force sur les corps. Les dessus des Bourdons 8 et de Flûte 4 ont été remis avec leur calottes soudées car elles se trouvaient quasiment posées sur le corps et l'étanchéité était nulle.

Alimentation :

Les réservoirs ne présentaient pas de lésions lors des essais d'étanchéité et il a donc été décidé de les conserver dans leur état actuel avec un simple renfort des aînes et des nez.

Les trois réservoirs ont été ouverts et nettoyés intérieurement. Cela a permis de découvrir un intéressant système de ressorts de compensation à lames de bois à l'intérieur des réservoir Stiehr. Les réservoirs sont effectivement peu chargés car les ressorts (quatre par réservoirs) sont reliés à la table supérieure par une corde et tracte cette dernière lorsque le réservoir monte en charge. L'inconvénient est sans doute une perte de pression lorsque l'orgue était sollicité à pleine puissance. Mais cela importe maintenant peu puisque seule la machine Barker est alimentée par ces réservoirs.

Les deux réservoirs Stiehr n'ont pas de parallèlisme mais sont guidés par des coulisses fixées aux tables supérieures. Celui de Jaquot possède des parallèlismes en fer à double compas.

Les gosiers sont entièrement remis à neuf, en conservant les éclisses. Remise en peau d'agneau de première souplesse, collée à la colle chaude. Mise en place de sangles de rappel pour un travail égal des 10 plis. Un pilote est placé à l'intérieur de ces gosiers, il commande les soupapes d'ouverture qui sont au nombre de quatre par gosiers. Ces soupapes sont à bascule.

Les grands anti-secousse du portevent principal de répartition ont été remis en peau.

Les portevent ont été vérifiés, traités contre les xylophages puis étanchéifiés avec un mélange de sciure et de colle réparti à la spatule pour le côté extérieur, encollés pour l'intérieur. Le portevent d'alimentation qui va du tremblant vers le sommier de positif n'a pas pu être conservé, il a été remplacé en copie.

Montage

Les sommiers ont été rapportés dès le mois de février 2002 à la fin de leur restauration en atelier et remis en place en juin après un pré-enchapage.

Les travaux se sont poursuivis avec le remontage mécanique à partir du 9 septembre mais nous avons du faire face à de réels problèmes avec le sommiers de Stiehr. Soit une erreur a été commise lors de leur restauration, soit ils ont travaillé durant les six mois d'entreposage dans l'église, tout est-il que nous avons dû reprendre l'intégralité des joints d'étanchéité et de l'enchapage après les premiers essais de jeu sur le clavier de Positif. Six semaines supplémentaires sur le chantier ont permis de trouver un équilibre stable et durable. Malgré tous nos efforts, la totale étanchéité (pas une soufflure, pas un emprunt) induit une dureté relative du tirage des registres.

Harmonisation et accord

La musicalité de cet instrument était totalement inconnue lorsque le classement, puis le cahier des charges, enfin les devis ont été faits. La mise en harmonie se révèlait être une résurrection pour l'ensemble des acteurs de la restauration.

Nous avons commencé par les fonds du Positif, fin octobre 2002. Les premiers sons nous ont surpris par leur tranchant et la précision des attaques. Malgré l'intervention de Jaquot, les biseaux étaient très peu dentés, voire pas du tout pour certains tuyaux (notamment au cornet). Le trouble était tel que nous sommes allés écouter l'orgue d'Hersbach qui bien que plus tardif avait l'avantage d'être le plus proche. Ce que nous y avons entendus nous a totalement confortés dans notre démarche et nous avons décidé de nous laissé entraîner par Stiehr, en toute confiance.

Il est absolument évident que l'harmonie de l'orgue n'a jamais été retouchée depuis sa mise en place par Xavier Stiehr. Jaquot s'est contenté de faire des entailles ou de recouper les tuyaux au ton sans reprendre les biseaux ou les hauteurs de bouche. Le jeu le plus déconcertant est le cornet dans lequel les tuyaux ont des attaques avec des parasites ou des partielles qui font plus penser à un orgue rustique du XVIIIe qu'à un instrument bien policé du XIXe.

Malgré les entailles, la tuyauterie sonne très bien. Il est évident que certains jeux comme les gambes n'ont plus le timbre Stiehr car les pavillons donnent un mordant qu'elles ne pouvaient pas avoir avec l'accord au ton. Peut-être sont-elles fragilisées.

La façade de Roethinger paraît assez pâle à côté des élans débridés des dessus. Nous avons retravaillé des biseaux, modifié les angles d'attaque et raboté les dents pour obtenir un mieux compatible.

Le récit de Jaquot s'est revélé tout a fait à part. La tuyauterie est très posée, bien sur son timbre malgré les entraînements entre jeux qui viennent d'une erreur de quinconce dans les chapes. On notera la basse de Flûte Harmonique bouchée, qui parle presque en Quintaton, donnant beaucoup de couleur aux basses de ce jeu. La Gambe est claire et stable malgré l'absence totale de freins (nous en avons ajouté sur les trois premières notes qui avaient un peu plus de difficulté à s'exprimer).

Le Hautbois est sobre et de bonne facture. La Clarinette a beaucoup de couleur avec une sonorité feutrée et ronde. La Voix Humaine est totalement grotesque, sa taille gigantesque n'apporte strictement rien à la sonorité (où est-il allé chercher cela ?).

Les anches de Stiehr ont causé bien des soucis. Mis à part le Basson qui est très beau et rappelle le Hautbois d'Amour et les anches du Positif qui demande moins d'éclat, toutes les Trompettes et le Clairon étaient injouables.

Pour ce qui est du Clairon, Jaquot avait réutilisé l'ancien Cor Anglais de 8', décalé en 4', les canaux et les languettes sont restés les mêmes et étaient sensés fonctionner à l'octave supérieure. Or le langueyage de Stiehr est très fort, avec une progression par demi-mesures car nous n'avons pas trouvé de languettes de 1/4 ou 3/4. Précisons aussi que ce Clairon est en fond de gravure sur une chape gravée. Bien évidemment, ce jeu ne donna rien du tout. Il n'a certainement jamais rien donné. Tout est-il que ce simple jeu remit en question tout notre travail d'harmonisation pourtant jusque là si évident. La pression avait-elle été montée, puis redescendue ? A force d'essais, il fallu bien se rendre à l'évidence que nos maîtres n'étaient pas exempts d'erreurs. Aussi la totalité des languettes des dessus de Clairon a été remplacée avec un langeyage plus fin.

A force de pugnacité, les autres jeux ont fini par entendre raison, malgré, le même défaut d'origine que le Clairon. Cela donne des anches assez fermées, trés allemandes diront certains.

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